Jazz in Marciac Acte XII – 10 août 2015
Katrina, 10 ans déjà !
Sans voir plus loin que le bout de mon nez, je me suis posé la question de savoir pourquoi les deux soirées de Wynton Marsalis tournaient autour de la Nouvelle Orléans, premières parties comprises.
Bien qu’il n’y ait eu aucune explication ou que ce soit, pas plus de la part du festival que de l’artiste, je ne peux croire un seul instant qu’il s’agisse d’une pure coïncidence.
Souvenez-vous, le 29 août 2005 l’un des six plus forts ouragans jamais enregistré s’abat sur la Louisiane et le Mississippi. Il a pour nom Katrina. Les dégâts sont considérables et la Nouvelle Orléans, bâtie sous le niveau de la mer, est totalement dévastée en dehors du Quartier Français. Les digues sensées protéger la ville ont cédées, la ville est noyée, des dizaines de milliers de personnes sont sans abris, le bilan humain approche les deux mille morts. Le maire républicain de la ville a très mal géré les choses, surtout avant l’arrivée du cyclone. L’administration Bush n’a pas fait mieux, offrant au monde l’image d’une Amérique en perdition et incapable de gérer cette crise majeure. Laissant à l’abandon pendant plusieurs jours une population à majorité noire.
Wynton Marsalis a donc sans doute choisi de commémorer à sa manière le dixième anniversaire de cette catastrophe, lui qui est natif de la Nouvelle Orléans ou sa famille réside toujours. Si c’est vraiment le cas, peut-être suis-je en train de me faire un film, pourquoi ne pas l’avoir dit ? Mystère…
Si la première partie de la soirée du 08 août, assurée par le Preservation Hall Jazz Band, avait été des plus plaisante, celle d’hier a été un peu poussive, voire soporifique quand on a vu tour à tour trois pianistes venir s’essayer à l’exercice du piano solo. Seul Aaron Diehl, le pianiste de Cécile McLorin Salvant, tirera un tout petit peu son épingle du jeu. Le jeune prodige de 12 ans, Joe Alexander, et Sullivan Fortner ne seront pas à leur avantage.
Puis, sur le coup de minuit vint le maître de cérémonie, Wynton Marsalis himself personnellement en personne, et comme d’habitude la magie s’installe. Second hommage à sa ville natale, mais dans un registre plus moderne. Cet homme est un extra-terrestre. Comment peut-on ainsi se renouveler aussi vite avec autant de finesse et d’aisance ? Je ne suis pas prêt d’oublier le morceau joué à l’entame du premier rappel tant il est allé le puiser au fond de lui-même pour nous l’offrir. Chapeau bas…
Au deuxième rappel, Dan Nimmer, le pianiste du groupe, laisse un moment sa place à Joe Alexander qui peut enfin donner toute la mesure de son talent précoce.
Comme souvent, le public répond présent et fait une chaude ovation aux artistes, heureux d’être ainsi récompensés.
Nous sortons vers deux heures du matin la tête dans les étoiles, au propre comme au figuré.
Patrick Guillemin – 11 août 2015