Jazz in Marciac Acte VI – 3 août 2015
Il me semble que la misère sera moins pénible au soleil (Charles Aznavour)
L’arrivée de Cuba sur la scène de Marciac aura bien tenue ses promesses. Roberto Fonseca et Chucho Valdès ont chacun dans leur genre donné à entendre une magnifique prestation, ravissant le cœur d’un public qui n’attendait que ça.
Même si Roberto Fonséca est né dans une famille de musiciens et qu’il était déjà auteur/compositeur chevronné (et diplômé) lorsqu’il a croisé la route du Buena Vista Social Club en 2001, on peut considérer que sa carrière de musicien a réellement décollée à partir de ce moment crucial pour lui.
Au sein du Buena Vista, sans doute Ibrahim Ferrer l’a-t-il pris sous son aile et un certain rapport filial s’est probablement instauré entre eux. Toujours est-il que Roberto Fonséca lui voue un immense respect et qu’il ne peut jamais retenir ses larmes lorsqu’il évoque le musicien disparu en 2005, quelques jours à peine après son concert sur la scène de Jazz in Marciac…
Des larmes, il en aura beaucoup versés l’autre soir, lors de son concert hommage à Ibrahim Ferrer. Incapable de les retenir tant la tension était forte. De même pour Ibrahim Ferrer Jr, dont la voix a ravi le chapiteau gerseois.
Mais, plus que dans tout autre musique vivante, qu’il s’agisse du blues, du flamenco ou d’autres encore, la musique cubaine lance un formidable défi à la mort et au néant pour lui signifier que la vie et la joie, malgré tout, seront plus fortes. Elles l’étaient sans aucun doute avant-hier…
Tout autre est l’hommage qu’est venu célébrer, ou plutôt auto célébrer, Chucho Valdès et ses musiciens. Magnifique orchestre de virtuoses ou l’équilibre entre cuivres et percussions est magnifiquement respecté.
Né en 1941, choisissant de rester à Cuba malgré la révolution, Chucho Valdès est un monument de la musique cubaine. Réussissant dès ses débuts la parfaite synthèse entre le jazz afro-américain, la musique populaire locale et les rythmes africains, signes persistants de l’importation massive d’esclaves sur l’ile. Il est le premier musicien cubain à recevoir un Grammy Awards avec le groupe « Irakere » en 1980. Il en obtiendra quatre de plus au cours de sa longue carrière.
Irakere signifie forêt dense en Yoruba, la langue parlée au Nigéria, au Togo, au Bénin, et parfois encore à Cuba.
C’est donc au groupe de ses débuts que Chucho Valdès rend joyeusement hommage sur la scène de Jazz in Marciac avant-hier. Comme je l’ai évoqué plus haut, le savant mélange de jazz (On entend nettement le thème du « Take Five » de Dave Brubeck), de percussions africaines et de musique cubaine donne au public l’envie de danser et de se laisser aller au bonheur de l’instant présent.
Revenez quand vous voulez, Mr Valdès, avec vous il y a toujours ce petit plus qui fait la différence et rend la fête inoubliable. Et sans gueule de bois, à consommer sans modération…
Patrick Guillemin – 5 août 2015