Jazz in Marciac – 30 juillet 2016 – Mélange des Genres
Hier soir, ce que l’on nomme le jazz, mais qui n’en a en réalité bien souvent que le nom, s’est acoquiné avec d’autres sonorités bien plus proches du Mississippi et des racines du jazz que certains pourraient, ou voudraient, le penser.
C’est d’abord au groupe français Panam Panic d’entamer ce mélange des genres. Sans trop en faire toutefois, puisque c’est sur la fin de son set que le rappeur américain Beat Assaillant viendra mêler ses propres sonorités au groupe.
Sans aucun jugement de valeur de ma part, Panam Panic c’est exactement ce qui m’ennuie profondément dans ce qu’on appelle le jazz, aujourd’hui. Une musique savante, plus proche du classique que du jazz afro-américain. L’apport du rap, même si je n’ai jamais accroché, ramène un peu cette musique vers ses origines.
Sur le papier, c’est le pianiste Yaron Herman qui était censé inviter Matthieu Chedid… Dans la vraie vie, on a surtout eu le sentiment que c’était plutôt le contraire, tant la présence et le charisme du guitariste sont forts.
Hier soir, avec sa gentillesse et son humilité naturelles, mais aussi avec une grande maitrise et une virtuosité sans faille, Matthieu Chedid nous a montré qu’il peut tout jouer et tout faire sans jamais perdre à un quelconque moment sa personnalité profonde. Parmi la jeune génération d’artistes français, il est l’un des rares, voire le seul, à avoir parfaitement digéré la culture afro-américaine pour l’assimiler à sa propre personnalité musicale.
Dès lors, son aisance à dialoguer avec d’autres musiciens pratiquant d’autres styles se fait sans aucune difficulté.
Yaron Herman a semblé un peu perdu et un peu en difficulté pour imposer une personnalité pourtant bien réelle. En revanche, le batteur Ziv Ravitz et notre virtuose saxophoniste Emile Parisien ont semblé comme des poissons dans l’eau et ont été à la hauteur de la joute proposée amicalement par le guitariste. Pour ma part, c’est même la première fois qu’Emile Parisien me donne le frisson. C’est peu dire…
Certains vont sans doute crier au sacrilège, mais à l’écoute de ce concert, je n’ai pas pu m’empêcher de penser que ce que j’écoutais là aurait pu ressembler au travail qu’aurait dû effectuer ensemble Miles Davis et Jimi Hendrix. Le savant mélange du jazz et du rock nourrit au lait maternel du blues. Tout ce que le jazz-rock a été incapable de faire par la suite.
Ce n’est que du rock’n’roll m’ont dit certains hier soir, avec une pointe de mépris. Pourtant, la musique de Matthieu Chedid est bien plus proche des racines du jazz que ne peut l’être 80% de ce que l’on appelle jazz aujourd’hui…
Attendez un peu avant d’allumer le bucher pour m’y mettre…
Patrick Guillemin – 31 juillet 2016