C’est en cherchant à savoir si par hasard Brian Setzer se produirait par chez nous, que je suis tombé sur le festival Blues Peer en Belgique. Seule et unique date européenne que j’ai trouvé pour le ci-devant Setzer. Pas de quoi rassasier un « Wild Cat » affamé. A moins que…
Bien entendu, j’ai trouvé ça à la dernière minute ou presque. Aussi, quand j’ai envoyé ma demande d’accréditation, c’était avec la certitude de rester sagement à la maison…
Pourtant, l’affiche a de quoi faire saliver le plus blasé. Réunis sur la même affiche, Brian Setzer, Buddy Guy, Taj Mahal, Joe Bonamassa, Larry Graham, j’en passe. La perspective de rester devant la cheminée alors que l’été commence tout juste à pointer le bout de son nez, ne me réjouit pas plus que ça. Aussi, lorsque trois jour plus tard une réponse positive arrive sur ma boite mail, c’est l’heureuse surprise.
Située à une quarantaine de kilomètres d’Eindhoven, en région flamande, Peer est une petite bourgade proprette ou le temps semble s’écouler paisiblement. Loin, très loin des ghettos urbains de Chicago ou de la misère des champs de coton du Mississippi.
C’est pourtant là que ce qui est sans doute le plus important festival de blues en Europe, et l’un des plus anciens, a décidé de s’implanter. A la trente-deuxième édition, le public répond toujours présent. Il fait dire que l’affiche 2016 n’est pas un pur produit du hasard. Les plus grands sont passés par là à un moment ou à un autre, de Cab Calloway à Stevie Ray Vaughan, en passant par John Lee Hooker, B.B King, Ray Charles ou John Campbell.
L’accueil est sympathique, l’organisation sans faille. Il manque juste un peu chaleur humaine pour présenter une programmation trois étoiles, et quelques rencontres entre musiciens.
Après deux journées passées à travailler dans les meilleures conditions qui soient, je ne peux que me poser la question de savoir pourquoi nous n’avons pas l’équivalent chez nous. Peer, c’est ce que Cognac Blues Passions aurait pu devenir si certains n’avaient pas eu la folie des grandeurs…
En dehors de celui-là, aucun en France n’a jamais approché de près ou de loin Blues Peer. Pourquoi ?
En France, quand Joe Bonamassa (ou d’autres) passe, il est quasi impossible de l’approcher. A Blues Peer nous étions plus d’une vingtaine de photographes en face de lui. Sans parler des contrats à signer avec menace de prison à vie si on ne les respecte pas. Là-bas, rien. Pourquoi ? Qui a intérêt à compliquer les choses en France ? Beaucoup de questions qui resteront sans doute longtemps sans réponse.
Côté scène, il y en aura eu pour tous les goûts. Du blues pur sucre au rockabilly, en passant par de la pop bluesy et du funk pur et dur. Des qui confondent vitesse sur le manche et feeling (Bonamassa) et qui croient que parce que Clapton a jeté un œil sur eux un soir de cuite (je sais, il ne boit plus…), ils sont les rois du blues. Ceux qui ont tout assimilé et mériteraient d’être bien mieux reconnus (Walter Trout).
Mieux encore qu’à la Défense, Larry Graham aura été impérial, faisant le show et diffusant un funk festif.
Sur scène, Buddy Guy a fait du Buggy Guy. C’est-à-dire un set très moyen au regard de l’immense musicien qu’il est. Mais ça marche, alors… Et puis, à plus de quatre-vingts ans, ça reste sympa à écouter et à voir. L’homme est chaleureux et parodie toujours à merveille… Buddy Guy…
Quant à Brian Setzer, il a clôturé le festival comme ZZ Top à Tilloloy quelques semaines plus tôt, à savoir de manière impériale. Le génial guitariste rockab’ est aussi motivé et affuté qu’il l’était à vingt ans quand il créa les Stray Cats. A croire que les années n’ont aucune prise sur son perfecto. Quel bon moment passé en sa compagnie. J’avoue que j’prendrai bien un peu de rab…
Mention spéciale à la chanteuse autrichienne Meena Cryle accompagnée du Chris Fillmore Band. Ces deux-là connaissent la vie, la musique, et savent parfaitement restituer tout ça sur scène. Je leur souhaite le plus bel avenir qui soit, leur set était fort intéressant.
A l’année prochaine, si on veut bien de moi. En tout cas, un grand merci pour cette invitation, c’était vraiment une belle parenthèse.
Patrick Guillemin – 21 septembre 2016