Jazz in Marciac – 11 août 2016 – Black soul et clonage
Pour la seconde année consécutive, Nico Wayne Toussaint assure l’ouverture de la soirée blues à « L’Astrada », la belle salle en dur de Marciac, scène bis du festival pour l’occasion.
Bien qu’auréolé de ses divers titres acquis l’an dernier à Memphis, rien n’a pour autant changé dans l’attitude de celui qui est pourtant depuis longtemps, l’un des meilleurs harmoniciste de blues. Oui mais voilà, il est blanc, et surtout, Français. Donc peu crédible aux yeux du public d’aficionados qui s’accroche à cette musique comme les morpions à la peau.
Costard repassé de près, chemise blanche, l’homme à l’harmonica ressemble à s’y méprendre à ses modèles. Aux grandes heures du blues et du jazz, tous, sont sapés comme des princes. Par respect pour leur public, mais aussi, sans doute, pour séduire plus facilement un public féminin nombreux et acquis à leur cause.
La musique que l’on entend sur scène n’a rien à envier à celle du South Side ou du West Side de l’âge d’or. Pas une pâle copie, non, surtout pas. Le blues que joue Nico Wayne Toussaint lui est propre, et quand il s’attaque à un morceau qui appartient au corpus commun, il le fait sien. On se croirait face à un orchestre du West Side, au fond d’un bouge de Chicago. Et ce ne sont pas les riffs acérés de Florian Royo qui me démentiront.
Nul doute, l’âme de Nico Wayne Toussaint est bien noire, et il la transpire à merveille pour nous, ce soir. Le public suit, mais c’est la belle Ana Popovic qui a son cœur. Et pourtant…
Perchée sur des talons vertigineux, la guitariste serbe a tôt fait de mettre le public de son côté. Il faut reconnaître que sa technique de guitare n’a d’égale que sa plastique et approche la perfection. Une pincée de Jimi Hendrix par ci, un soupçon de Stevie Ray Vaughan par-là. Bref, elle sait tout jouer…
Toutefois, pour moi, la musique n’a rien d’une démonstration, et encore moins d’une imitation de Pierre, Paul, Jacques. Le musicien qui n’a rien à donner de lui-même lorsqu’il monte sur scène n’est à mes yeux qu’un clone froid et sans âme. Je crains que cette gravure de mode n’échappe pas à ce que je viens d’écrire et que beaucoup soient plus attentif au contenant qu’au contenu. Mais c’est juste mon avis…
Patrick Guillemin – 12 août 2016